GYNÉCOLOGIE ET SANTÉ DES FEMMES
 
L'OFFRE DE SOINS - LES ACTEURS

Le gynécologue (suite)

Pour la gynécologie obstétrique

La situation est plus complexe. Il existe une désaffectation de la spécialité qui se manifeste par la vacance de postes de praticiens. En effet, en 1998, il existait 18 postes de praticiens hospitaliers vacants de GynObst dans le secteur public et 116 postes hors CHU (J.O. 19 février 1998). Ceci est lié au manque relatif d'attractivité de la profession qui reste peu choisie par les étudiants. Ce désintérêt de la spécialité est à corréler à la pénibilité des conditions d'exercice de la gynécologie obstétrique, à l'augmentation constante des problèmes juridiques et médico-légaux que rencontrent ces praticiens (liés notamment aux aléas thérapeutiques en chirurgie) et à la faible valorisation financière des actes dispensés [31].

Toutefois, d'après une enquête SOFRES réalisée pour Novartis en 1996 [30], les gynécologues obstétriciens en exercice, tout comme les gynécologues médicaux, ont une appréciation favorable de leur spécialité et notent des évolutions positives telles que l'amélioration des techniques, la prise en charge de la ménopause, le traitement de la stérilité, le suivi des grossesses (échographies...).

Par ailleurs, les cessations d'activité dont le nombre est estimé annuellement à 94 jusqu'à 2003 et à 187 après cette date ne seront pas compensées par l'arrivée de jeunes gynécologues [31].

En effet, d'après le rapport du professeur Nicolas, le nombre d'internes formés annuellement en 1997 et 1998 était compris entre 75 et 85. Après l'instauration en 1998 de la filière gynécologie obstétrique de l'internat (auparavant, elle était confondue avec les "spécialités chirurgicales"), le nombre de postes d'internes a pu être précisé. Il est de 111 en 1999 et pourrait être de 140 en 2000. On estime que deux tiers des internes formés en gynécologie se destineront à la pratique de l'obstétrique [4].

Ainsi, le nombre de cessations d'activité supérieur au nombre d'internes formés conduira à une diminution plus marquée de l'effectif des gynécologues obstétriciens entre 2003 et 2006, la formation durant cinq ans. La réduction attendue du nombre de praticiens sera d'environ 40 par an entre 2000 et 2003, puis d'environ 100 par an jusqu'en 2006. Elle se poursuivra ensuite plus progressivement (20 à 30 par an) au-delà de 2006.

Ceci est illustré par des courbes établies par une équipe spécialisée en projections démographiques et diffusées aux VIe Assises hospitalo-universitaires d'octobre 1999. Elles se fondent sur plusieurs hypothèses de nombre d'internes formés et mettent en évidence la chute des effectifs en gynécologie obstétrique (figure 5). Ces projections sont basées sur le chiffre de 5269 GynObst en 1999 [13].
[Les chiffres d'effectifs en gynécologie obstétrique cités ici peuvent être différents selon leur origine (CREDES, Conseil national de l'Ordre des médecins) et les moyens utilisés pour dénombrer ces spécialistes.]

Si on considère que 200 internes seront formés chaque année à la gynécologie obstétrique, le nombre de gynécologues obstétriciens serait environ de 4550 en 2020. Si le nombre annuel d'internes formés n'était que de 84, le nombre de gynécologues obstétriciens serait environ de 2800 en 2020. Dans tous les cas, l'effectif des gynécologues obstétriciens sera inférieur à celui d'aujourd'hui.

La figure 5 ne tient pas compte du fait que certains internes formés se destinent à la gynécologie médicale.

La pérennité de la situation actuelle conduirait à une réduction de l'effectif des gynécologues obstétriciens à 80% en 2006 et à 57% en 2020 [2].

fig 5
Figure 5
Prévision du nombre de gynécologues obstétriciens selon différentes hypothèses d'entrée au concours de l'internat: 84 à 200 internes par an.
Dans tous les cas l'effectif de gynécologues obstétriciens continuerait à se réduire et ceci même si 200 postes d'internes en gynécologie obstétrique étaient ouverts et pourvus.

 

Des réformes de la formation des gynécologues (cf. La formation des gynécologues p. 20) envisagées par le secrétariat d'...tat à la Santé prévoient l'ouverture de 200 postes en gynécologie dont deux tiers seront réservés à la gynécologie obstétrique, soit 133 GynObst formés par an dans l'hypothèse où tous les postes seraient pourvus. La figure 5 suggère que malgré l'ouverture de 200 postes en gynécologie obstétrique, le nombre de gynécologues obstétriciens continuerait à diminuer.

De plus, étant donné la féminisation de la profession et l'existence de risques médico-légaux en obstétrique, les choix de spécialisation se porteront plus volontiers sur la gynécologie médicale, moins contraignante dans sa pratique.

Caractéristiques socio-démographiques des gynécologues en France

Répartition par âge

Le tableau 4 montre clairement les conséquences de l'arrêt de la formation à la gynécologie médicale depuis 1984: les GynMed ont tous plus de 35 ans.

tab 4
Tableau 4
Répartition des gynécologues par tranche d'âge au 1er janvier 1998
L'âge moyen des gynécologues est de 47,2 ans en 1997. En 2010, 45 % d'entre eux auront plus de 55 ans.
(Source: SESI)

  

Les statistiques démographiques de la Caisse nationale d'assurance maladie (CNAM) montrent que la moyenne d'âge des GynTot a augmenté de cinq ans en dix ans pour atteindre en 1997, l'âge de 47,2 ans [25].

Les prévisions de l'INED en 1998 établissent que plus de 45% des praticiens auront plus de 55ans en 2010. Le vieillissement des gynécologues aura probablement un impact sur le nombre d'actes effectués. En effet, en 1993, il ressortait que l'activité des médecins âgés de plus de 55 ans était de 14% inférieure à celle des médecins âgés de moins de 55 ans [27].

Répartition par sexe

La gynécologie médicale est parmi les spécialités les plus féminisées. En 1997, elle comptait 88,3% de femmes.

Selon l'INED (1998) 45% des GynObst seront des femmes en 2010. Or, les statistiques de la CNAM (1997) montrent que les femmes représentent 15,8% des GynObst qui pratiquent des accouchements et 66,2% des GynObst qui exercent une activité mixte sans obstétrique (consultations et quelques actes chirurgicaux) [11,25,31].

De plus, il ressort que l'activité des femmes spécialistes (toutes spécialités médicales confondues) est de 31% (en nombre d'actes) inférieure à celle des hommes. Ce constat permet de conclure qu'une féminisation progressive de la profession aurait des conséquences sur le nombre d'actes effectués et sur leur type: les femmes ont en effet des pratiques moins chirurgicales [5].

Répartition géographique

Au manque de praticiens, s'associe une répartition géographique inégale des effectifs sur le territoire (annexe 1).

Au niveau départemental, au 1er janvier 1998 (SESI), la densité moyenne de GynMed était de 12,9/100 000 femmes âgées de 15 à 49 ans, avec un maximum pour les départements du Sud-Ouest et un minimum en Centre-Auvergne. Quant à la densité moyenne des GynObst, elle était de 32,3/100 000 femmes âgées de 15 à 49 ans, avec un maximum à Paris, dans certains départements d'Alsace, de Provence-Côte d'Azur et du Languedoc-Roussillon, et un minimum dans les Pays de la Loire ou en Auvergne.

Activité des gynécologues

Les gynécologues exerçant aujourd'hui en France ont un type d'exercice varié, du fait qu'ils ont accédé à la spécialité par diverses formations. Ainsi le Syndicat national des gynécologues et obstétriciens de France (SYNGOF) distingue quatre grandes familles de gynécologues (figure 6):
– les gynécologues médicaux : 35 %,
– les gynécologues médicaux et obstétriciens : 12 %,
– les gynécologues médicaux, obstétriciens pratiquant la chirurgie : 50 %,
– les chirurgiens gynécologues : 3 %.

fig 6
Figure 6
Répartition des gynécologues selon leur type d'exercice
Aujourd'hui, la moitié des gynécologues pratiquent la gynécologie médicale, l'obstétrique et la chirurgie.

  

Types d'actes

La spécialité de gynécologie est riche en sous-spécialités, ce qui rend difficile la définition exacte des actes pratiqués par chacun des gynécologues [31].

Les activités des gynécologues (GynTot) peuvent être variées: gynécologie médicale, obstétrique, chirurgie gynécologique, oncologie, assistance médicale à la procréation (AMP) et diagnostic anténatal.

La gynécologie médicale est pratiquée par plus de 90% des GynTot et plus d'un sur trois s'y consacre de manière exclusive (ne pratiquant ni chirurgie, ni accouchement).

L'obstétrique est pratiquée par moins des deux tiers des GynTot (62% selon l'enquête SYNGOF de 1998). Leur activité varie selon la taille et l'équipement de l'établissement où ils exercent. Certains, parallèlement à la pratique de l'obstétrique, font de la chirurgie, de l'oncologie ou de l'AMP (aide médicale à la procréation), en fonction de leur formation et des dispositions législatives.

L'AMP est exercée par environ 5% des praticiens qui réalisent chacun en moyenne 83fécondations in vitro (FIV) par an dans des centres agrémentés, chaque centre effectuant 440 fécondations par an en moyenne. On estime toutefois que l'induction d'ovulation est pratiquée par environ 2 000 gynécologues.

Près de 36% des gynécologues pratiquent des actes entrant dans le cadre large du diagnostic anténatal, échographies et pratique de l'amniocentèse comprises.

Depuis 1993, l'activité de l'ensemble des gynécologues a progressé plus lentement qu'auparavant. Selon le SYNGOF, la progression annuelle du nombre d'actes par praticien est passée de +0,7% entre 1990 et 1995 à - 2,9% après 1995 [31]. La base de données

Éco-Santé précise que les gynécologues effectuaient chacun en moyenne 3 300 actes annuels en 1996.

La baisse d'activité observée reflète l'importance croissante des préoccupations relatives à la maîtrise des dépenses de santé avec cependant la volonté de satisfaire l'intérêt des patientes à la fois sur un plan social et médical.

Selon une enquête de la SOFRES pour Novartis [30] réalisée en 1996 auprès de 802 gynécologues [Leur domaine d'activité privilégié (parfois double) était : la gynécologie médicale pour 62 % d'entre eux, l'obstétrique, à 40 %, et la chirurgie à 11 %.], ces spécialistes effectuaient en moyenne 3,8 types d'examens paracliniques (frottis, 97%; prélèvements, 83%; échographies, 61%; hystérographies, 40%). Les actes le plus souvent dispensés concernaient le suivi de la contraception (79% des médecins interrogés), le suivi de la ménopause (69%), et le suivi des grossesses (68%).

Ces chiffres pourraient ne pas refléter l'activité de l'ensemble des praticiens. En effet, la répartition des gynécologues interrogés n'était pas précisée, leur domaine d'activité privilégié était le plus souvent la gynécologie médicale. Par ailleurs, ils sont fondés sur les seules déclarations des médecins interrogés. Cela pourrait expliquer les différences observées avec les autres sources de données (EPPM, Thalès).

Type d'exercice: privé et/ou public

L'exercice de l'ensemble des gynécologues se répartit comme suit [31]:
ï 79% libéral
– 49% ont un exercice libéral exclusif,
– 30% exercent en libéral, à temps partiel.
ï 21% hôpital
– 13% sont praticiens de l'hospitalisation publique avec un secteur privé à l'hôpital,
– 8% sont praticiens de l'hospitalisation publique exclusivement (sans consultation privée).

D'après la CNAM, l'effectif des gynécologues libéraux diminue de 0,5% par an en moyenne depuis 1995. En 1997, 65 nouveaux gynécologues libéraux se sont installés alors que, pour la seule année 1988, on enregistrait 566 installations de gynécologues [25].

Comparaisons avec l'Allemagne et les Pays-Bas

* En Allemagne, où la formation spécifique à la gynécologie médicale n'existe pas, l'effectif total des gynécologues (GynTot) est important en dépit de la réduction considérable du nombre de médecins allemands ces trente dernières années (Federal Statistical Office Germany). Le nombre total de gynécologues était de 14 500 en 1999, ce qui représente un gynécologue pour 2 460 femmes (1 gynécologue pour 3 700 femmes en France en 1998).
La tendance des effectifs de gynécologues allemands est précisée dans le tableau 5.

Les femmes allemandes sont très attachées à la possibilité de recourir directement à leur gynécologue sans passer par le filtre d'un médecin référent. Un projet de loi récent (avril 1999), qui prévoyait l'absence de prise en charge en cas de consultation directe du médecin spécialiste, a été violemment combattu, non seulement par les gynécologues, mais aussi par les associations féminines. Le projet a donc été amendé et l'accès direct a été maintenu pour deux spécialités: la gynécologie et l'ophtalmologie. Ce projet a finalement été rejeté par le Parlement.

Tableau 5
Effectifs de gynécologues en Allemagne : évolution depuis 1990 et perspective 2010
Deux tiers des gynécologues allemands ont une pratique de ville exclusive.
tab 5

  

 La formation des gynécologues comprend quatre ans d'études postdoctorales et nécessite une formation continue dont le contrôle est draconien: revalidation des compétences tous les trois ou quatre ans, selon les Länder. Les actes de gynécologie sont dispensés presque exclusivement par les gynécologues et les médecins généralistes ne pratiquent pas de gynécologie. Les deux tiers des gynécologues allemands exercent en pratique libérale et une tendance au regroupement s'est fait sentir depuis plusieurs années. En ville, certains gynécologues pratiquent uniquement la chirurgie ou la gynécologie médicale.

* Aux Pays-Bas, il existe environ 700 gynécologues, ce qui représente en termes de densité médicale moins de 1 gynécologue pour 10 000 femmes néerlandaises (densité quatre fois plus faible qu'en Allemagne). L'effectif de la spécialité aura sans doute tendance à augmenter dans le futur car le nombre de gynécologues en formation est passé de 100 en 1990 à 200 en 1999.

Le médecin généraliste assure une part importante des actes gynécologiques. Il prend en charge la contraception et la surveillance de la ménopause. Il est par ailleurs un "passage obligé" et son intervention conditionne le remboursement des consultations spécialisées par l'assurance maladie hollandaise. La gynécologie est une spécialité hospitalière: il n'existe pas de cabinets privés de gynécologues aux Pays-Bas.

Les départements de gynécologie obstétrique sont structurés en unités séparées: la chirurgie, l'obstétrique, l'endocrinologie de la reproduction et la cancérologie. Tous les praticiens participent au service de garde des accouchements, ce qui permet d'alléger le fardeau nocturne des obstétriciens.

La formation des gynécologues est de six ans. Elle permet en principe d'exercer toutes les sous-spécialités de la discipline. Toutefois les deux dernières années de formation sont le plus souvent réservées à une des sous-spécialités.

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© 2000, Jean Cohen, Patrick Madelenat, Rachel Levy-Toledano - ISBN 2-86911-958-5
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Diffusion sur l'internet : CNGOF (Collège National des Gynécologues et Obstétriciens Français) (30 mai 2000)